Shinto - the Kami Way

   «Shinto, the indigenous faith of the Japanese people, is relatively unknown among the religion of the world. Many people are familiar with the torii, the typical gateway to Shinto shrines, and some have a vague impression of the unique ornamentation which adorns many shrine roofs. Yet to all but a few, the shrines to which the torii leads and the Shinto faith which it symbolizes are very much of an enigma.» (p1)
   Peu de pays de pays présentent une si forte association entre culture et religion propre comme pour l'Inde et l'hindouisme ou le Japon et le shintoïsme. Pour retrouver une telle ressemblance, une telle symbiose entre un peuple et son panthéon dédié, il faut remonter souvent aux traces de civilisations disparues, comme les sumériens, grecs antiques, égyptiens anciens ou aztèques et autre mayas. Depuis quelques millénaires maintenant les trois monothéismes et le bouddhisme associés à des mouvements coloniaux ont eu raison d'une grande partie des animismes et polythéismes majeurs et locaux. Ainsi les Baal, Apollon et autres Quetzalcóatl furent depuis longtemps pétrifiés dans la pierre dure et froide des musées.

   Ce livre nous propose une introduction à une religion insulaire en ce qu'elle relève de particulier dans ses caractéristiques organisationnelles, spirituelles et culturelles. Bien que datant de 1962, l'essence du propos n'a guère changé malgré la modernisation fulgurante que le pays a connu depuis l'issu de la deuxième guerre mondiale.

   L'objet du culte du Shino est le kami. Parfois traduit par le terme dieu afin de satisfaire au besoin de comparer entre eux des éléments culturels parfois peu comparables, l'ouvrage viens ici nous aider à mieux cerner ce concept de divinité.
   «Fundamentally, the term [kami] is an honorific for noble, sacred spirits, which implies a sense of adoration for their virtues and authority. All beings have such spirits, so in a sense all beings can be called kami or be regarded as potential kami. However, because the term is an honorific, it is not customary to apply it to ordinary individuals or beings. [...]
   Among the objects or phenomena designated from ancient time as kami are the quality of growth, fertility and production; natural phenomena, such as wind and thunder; natural objects such as the sun, mountains, rivers trees and rocks; some animals, and ancestral spirits» (p6-7)
   Dans la conception shintoïste du monde, presque tout peut être ou devenir kami: les animaux, les éléments ou phénomènes de la nature, les humains. Dans la première catégorie, les renards blancs (inari okami) sera le plus répandu, dans la dernière catégorie le shogun Ieyasu Tokugawa dont le sanctuaire peut se visiter à Nikko ou l’empereur Meiji dont le sanctuaire peut se visiter à Tokyo sont les deux plus solennels exemples. Entre les deux catégories, une pléiades d’esprits mineurs ou majeurs seront rattachés à un arbre, une pierre, une rivière, des montagnes...
   C'est cet attachement à la nature, la bonne composition avec l'environnement qui motive le shintoïsme et son culte. Le propos de livre n'est pas de dire que le Shinto serait une religion "verte" à la sauce Greenpeace, mais que le Shinto renforce et repose sur une philosophie de cohésion entre monde matériel et les manifestations physiques du monde non matériel.

    Clergé décentralisé qui permet une plus grande imprégnation et implication des prêtres dans la vie communale et sociale de la paroisse a aussi permis à cette religion non pas de surmonter les changements sociétaux induits par la modernisation mais de canaliser, formater et intégrer le développement et l'occidentalisation de l'île dans un cadre culturel pré-existant et ainsi de préserver l'identité insulaire et d'éviter de plus grande anomies sociologiques. La bonne composition des éléments entre eux doit prévaloir.
   «Shrines not inly have a close connection with their natural surroundings and local history, but they are also usually closely related to the local residents. As social conditions in ancient Japan changed, much of the mythology and records lost their meaning and authority; but the rites and ceremonies in the shrines acquired an enhanced significances» (p46)
   Comme il existe une myriade de kami, la profusion de divinités permet une très grande diffusion du culte dans de large différences de tailles et localités, ainsi en 1958 l'Association des sanctuaires Shintoïstes recensait 79.457 sanctuaires.

   Dans son objectif introductif, l'ouvrage fera parcourir au lecteur, grâce à quelques chiches illustrations, les éléments constitutifs du culte avec différents types d'architectures et d'objets rituels. Seront donc passés en revue un certain nombre d'objets des plus connus comme les torii à des moins comme le gohei. Car si les objets comme le miroir ou le haraigushi sont récurrent, la longue histoire du shintoïsme a permis le développement (comme en occident) de quelques variations en ce qui concerne les styles des sanctuaires ou des torii autour d'une structure cohérente.
   Et au-delà de cet aspect folklorique que le Shinto peut revêtir, le texte devient intéressant lorsqu'il s’étend aux conditions de l'encadrement de la religion et aux interactions avec la vie sociale quotidienne, aussi l'évolution de la religion fut ponctuée par différents éléments historiques car c'est autour du Shinto  que l'état à également voulu construire et organiser la société, même dans ses excès. Si cette religion repose sur le principe que le culte vise à unifier et harmoniser les nombreux kami en vue d'une coopération qui rende ce monde possible, elle fut également l'outil du nationalisme et du militarisme pour renforcer l'unité autour du culte de l'empereur.

   Une étape dans l'évolution du shinto fut celle du syncrétisme avec le Bouddhisme. Il est volontiers dit des Japonais qu'ils vivent shintoïstes et meurent bouddhistes, et en effet cela tient bien à deux choses fondamentales: d'une part la sécularisation profonde du Shinto dans la vie quotidienne de la population et d'autre part aux philosophies distinctes des deux religions. Et le rapport au Bouddhisme apparait alors comme un complément là où le Shinto sera lacunaire.
   «The world of the Kami does not transcend that of man, and man does not need to seek to enter a divine, transcendental world to attain salvation. Humanity seeks salvation by bringing the sacred into the human world, into the daily life of the home, the marketplace, and the cooperation of the people.» (p107)
   La cohabitation entre les deux cultes fut suffisamment signifiante pour quelle laisse des traces dans le paysage culturel avec de nombreuses juxtapositions de temple et de sanctuaires. Et c'est lors de la restauration Meiji que le Shinto devint religion d'État, avec son ministère et que la désolidarisation d'avec le bouddhisme fut acté avec le recensement systématique de tous les bâtiments signalés comme étant d'obédience Shinto.
   Cette curiosité, cette intrigante compatibilité entre deux systèmes pourtant opposables repose en partie sur la caractéristique du Shinto, religion polythéistes, voire animiste, qui s’affranchit, au contraire des monothéismes, de pères fondateurs et de textes sacrés, de pouvoir donc faire une place dans son panthéon à d'autres divinités, comme celle de Bouddha. Un syncrétisme en surgira durant une partie de l’histoire nippone, et là où Rome échoua à intégrer les dieux des Hébreux où des proto-Chrétiens, cela fut possible entre Shinto et Bouddhisme car, après tout, les kami ne seraient ils pas autre chose que des avatars de Bouddha ?

   Aujourd'hui le Shinto reste une religion populaire et indigène qui alimente le calendrier des festivité tout au long de l'année et l'imaginaire de la population dans ses traditions diverses, et qui ponctue lavie sociale et familiale des japonais en s'appuyant sur trois principes.
   « To express gratitude for divine favor and the benefits of ancestors, and with a bright, pure, sincere mind to devote ourselves to the shrine rites and festivals.
   To serve society and others and, in the realization of ourselves as divine messengers, to endeavor to improve and consolidate the world.
   To identify our minds with the emperor's mind and, in loving and being friendly with one another, to pay for the country's properity for peaceful co-existence and co-prosperity for the people of te world»


   Abordable, l'ouvrage cherche à couvrir les divers aspects du Shinto, sans toutefois rentrer dans une exhaustivité laborieuse, ce qui permet au lecteur de se faire une première idée d'une religion présentée comme faiseuse de lien social tout en offrant une relation au sacré relativement dénué de grands dogme contraignants. Ainsi la croyance ne s'enseigne pas; mais elle s'exerce au cours des rituels et festivals récurrents; elle promeut l'idée du développement d'une société intégtrée et unie grâce à la bonne coopération mutuelle des individus; et elle développe une éthique basée sur l'appréhension d'une bonne ou mauvaise valeur dans les faits et les attitudes des individus.
   Le lecteur sera ainsi confronté aux premiers éléments constitutifs de cette religion indigène et y trouvera les termes clés et idées centrales afin de pouvoir poursuivre d'autres connaissances dans des ouvrages plus fournis sur soit les différents types de sanctuaires, la mythologie nippone, l'emploi des symboles dans la vie courantes, la place et le rôle du Shinto dans la société moderne, ou la listes des divers festivals, etc...



Shinto - the Kami Way, Sokyo Ono


Japon et Religion
Éd. Tuttle, Japon, 1961
ISBN 9780804835572



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